Donc, dans
la dernière partie de ce quatrième cours, nous allons mettre en place
une première approche du produit de convolution pour les distributions.
Et ce que nous allons regarder dans un premier temps, c'est le produit de
convolution d'une distribution quelconque par une fonction
de classe C infini à support compact,
ou bien d'une distribution à support compact
par une fonction de classe C infini.
Alors, commençons par rappeler comment les choses
se passent dans le cas des fonctions.
Donc, le produit de convolution des fonctions est
une notion qui est bien connue en intégration.
On peut définir, par exemple, le produit de convolution
d'une fonction localement intégrable petit f sur R N,
et d'une fonction phi qui serait continue à support compact dans R N.
Le produit de convolution de f et de phi étant
la fonction définie par la formule f étoile phi au point
x, est l'intégrale sur R N de f de z, phi de x moins z, dz pour tout x dans R N.
Alors, évidemment, comme phi est à support compact, la fonction qui à z associe
phi de x moins z est également à support compact, de sorte
que l'intégrale sur R N de f de z, phi de x moins
z dz est, en réalité, restreinte au compact qui est le support
de la fonction phi de x moins z, vue comme fonction de z.
Donc, comme f est localement intégrable, cette intégrale existe.
Bien.
On définit ainsi une fonction qui est notée f étoile phi,
un produit de convolution est toujours noté avec une étoile.
Fonction f étoile phi qui est définie pour tout x dans R N.
J'attire votre attention sur le fait que f, elle,
est définie uniquement pour presque tout, x dans R N.
Mais le produit de convolution par phi, lui, est défini pour tout x dans R N.
Passons en revue les propriétés de base de cette notion
de produit de convolution.
Alors, pour tout f localement intégrable sur R N, et
pour tout phi de classe C infini à support compact
sur R N, eh bien, on vérifie très simplement, d'une
part, que f étoile phi est égal à phi étoile f.
Cette première égalité se vérifie en faisant le changement
de variable, z donne x moins z dans l'intégrale définissant
le produit de convolution f étoile phi. Bien.
D'autre part, on vérifie par dérivation sous le signe somme,
sous le signe d'intégrale définissant le produit de convolution, on vérifie
que f étoile phi, ou phi étoile f, c'est la même
chose, est une fonction de classe C infini sur R N.
Deux propriétés supplémentaires que nous utiliserons.
Première propriété : la
majoration du support d'un produit de convolution.
Donc, si f est localement intégrable sur R n, et phi de classe C infini
à support compact sur R N, ou même,
simplement, continu à support compact sur R N.
Eh bien, le support de f étoile phi
est inclus dans l'addition des supports, dans le
support de f plus le support de phi, ou ce que l'on note a plus b.
Lorsque a et b sont deux parties de R N,
c'est l'ensemble des sommes x plus y, où x appartient à a, et y appartient à b.
Deuxième propriété : pour f localement intégrable sur R N.
Pour phi et psi, C infini à support compact sur R N,
ou même, simplement, continu à support compact sur R N, ça suffirait.
Eh bien, f étoile phi convolé avec psi est
égal à f convolé avec le produit de convolution
de phi avec psi.
Autrement dit, le produit de convolution tel qu'il est défini est associatif.
Évidemment, cette égalité a bien un sens, parce que
au membre de gauche, f étoile phi, d'après ce qu'on
vient de dire, est une fonction de classe C
infini sur R N, continue si phi est seulement continue.
f étoile phi étant une fonction de classe
C infini sur R N, elle est localement intégrable.
Je peux donc en prendre le produit
de convolution par psi, et dont le membre de droite f est localement intégrable, et
phi étoile psi est une fonction de classe C infini,
puisque phi est localement intégrable, et psi de classe C infini à support compact.
D'autre part, cette fonction de classe C infini, elle est bien à
support compact, grâce à la majoration du support donnée à la propriété 1.
Le support
de phi étoile psi est, en effet, majoré par
l'addition du support de phi et du support de psi.
L'addition de deux compacts donnant donc, un ensemble compact.
Deuxième propriété des distributions dont nous aurons besoin,
qui est la propriété de continuité séquentielle des distributions.
Dans la partie précédente de ce cours, nous avons vu la propriété de continuité
séquentielle des distributions à support compact, et
nous avons vu qu'il y avait une
petite subtilité pour étendre cette propriété de
continuité séquentielle au cas des distributions quelconques.
Alors, voyons maintenant, comment fonctionne
la continuité séquentielle des distributions quelconques.
Eh bien, pour cela, je vais définir la notion de suite convergente dans l'espace
des fonctions test, dans l'espace des fonctions
de classe C infini à support compact.
Soit donc, oméga ouvert de R N, une suite phi n de fonction de classe C
infini à support compact dans oméga, et phi
appartenant à C infini à support compact dans oméga.
Eh bien, on dira que phi n converge vers phi dans C
infini à support compact de oméga, si les deux propriétés suivantes sont vérifiées.
Première propriété : il existe K compact inclus dans oméga
indépendant de n qui contient tous les supports des termes de la suite phi n.
Autrement dit, support de phi n est inclus dans ce même compact K pour tout n.
Et deuxièmement, les dérivées partielles de tous ordres de phi n, convergent vers
les dérivées partielles correspondantes de phi, uniformément sur oméga tout entier.
Évidemment, avec cette définition-là, le support de phi
est également contenu dans K. Donc, proposition.
Eh bien, cette définition de suite convergente
dans l'espace des fonctions de classe C infini
à support compact, c'est la bonne définition
qui permet d'avoir la continuité séquentielle des distributions.
À savoir, que pour
toute distribution T sur oméga, si on a une suite phi n de fonction de classe C
infini à support compact qui converge vers phi, dans
C infini à support compact au sens défini ci-dessus.
Eh bien, la suite de nombres T appliquée à
phi n converge vers le nombre T appliqué à phi.
La démonstration est élémentaire. En effet, le point
1 de la définition de la convergence en C infini
à support compact nous donne un compact K qui va contenir
le support de phi, et ainsi que le support de tous
les phi n, pour tout n compact K inclus dans oméga.
Et maintenant, on écrit la propriété de continuité
de la distribution T relative à ce compact K.
Il existe donc une constante CK et un entier PK,
tel que T appliqué à phi moins phi n en valeur absolue soit majoré par
CK, norme de phi moins phi n d'indice PK dans K.
Mais cette norme tend vers zéro, lorsque n tend vers l'infini, puisque les dérivées
partielles de tous ordres de phi n
convergent vers les dérivées partielles de tous ordres
de phi, uniformément sur oméga.
Bien, maintenant, avec ces notions-là, nous sommes prêts à
définir le produit de convolution d'une distribution par une fonction
de classe C infini à support compact, ou d'une distribution
à support compact par une fonction de classe C infini.
Dans le produit de convolution, l'essentiel c'est que
l'un des deux termes soit à support compact.
Donc, je vais introduire les notations suivantes qui seront commodes pour
la suite de cet exposé.
La translation sur les fonctions, ce que je noterai tau
z de phi, c'est la fonction phi de x moins z.
D'autre part, j'introduis la notation phi tilde pour
désigner la composition de phi avec moins l'identité
que l'on appelle parfois l'antipodie, puisque à chaque
point de Rn, elle fait correspondre le point antipode.
x donne moins x. C'est la symétrie par rapport à l'origine.
Alors, donc, je prends un couple T et phi, ou T est une distribution
sur R N et phi, une fonction de classe C infini à support compact sur R N.
Ou bien, T est une distribution à support compact sur
R N, et phi, une fonction de classe C infini
quelconque de R N. Le produit de convolution de T et de phi
est la fonction qui est donnée par la formule suivante : T étoile phi au
point x est égal au crochet de dualité de T, appliqué
à la fonction qui a y, associe phi de x moins y.
Autrement dit, c'est l'évaluation de la distribution
T sur la fonction tau x de phi tilde.
Formule qui définit une valeur pour tout x appartenant
à R N. L'objet qu'on définit ainsi, c'est donc
bien une application de R N dans R ou dans C, si T et phi sont à valeurs complexes.
Alors, une première propriété de cette définition,
c'est que la même majoration du support, qui vaut pour les
fonctions, vaut encore dans le cadre du produit de convolution d'une
distribution d'une fonction de classe C infini à support compact, ou
d'une distribution à support compact par une fonction de classe C infini.
En effet, sous les hypothèses ci-dessus, on vérifie très simplement que
le support de T étoile phi est inclus dans l'addition du support
de T et du support de phi.
Alors, faisons la petite démonstration, rapidement.
En effet, si x n'appartient pas à l'addition des supports, eh bien, si
je prends la fonction tau x de phi tilda, autrement dit la fonction
phi de x moins y vue comme fonction de y, cette fonction est
à support dans l'ensemble des x moins z, z appartenent au support de phi.
Et donc, le support de phi de x moins y, vu comme
fonction de y, par hypothèse, ne rencontre pas le support de T.
Et donc, lorsque j'applique T à cette fonction tau x de phi tilda, lorsque
j'applique T à la fonction phi de x moins y vue comme fonction de y,
forcément je trouve zéro, puisque j'applique une distribution à une fonction
test qui est nulle au voisinage du support de la distribution, une
fonction test dont le support est d'intersection avec la distribution.
Parfait, autrement dit, pour de tels x, T étoile phi de x est égal à zéro.
Alors, maintenant, étudions la régularité du
produit de convolution d'une distribution par une fonction
de classe C infini à support compact, si la distribution n'est pas à support
compact, ou d'une distribution à support compact
par une fonction de classe C infini.
On a vu que si je prends le
produit de convolution d'une fonction localement intégrable par une
fonction de classe C infini à support compact,
le résultat est une fonction de classe C infini.
Ceci est encore est vrai dans le cas des distributions.
Plus précisément, voilà ce qui se passe. Si T
et phi sont, pour T une distribution et phi une fonction
de classe C infini à support compact, ou T une distribution à support compact et phi,
fonction de classe C infini, toutes deux sur R n, le produit de
convolution T étoile phi est une fonction de classe C infini sur R n.
Et plus précisément, n'importe quel monôme différentiel d rond alpha agissant
sur T étoile phi est égal, indifféremment, au produit de convolution
de d rond alpha T par phi, ou bien de T convolué par d rond alpha phi.
Ceci vaut pour tout alpha multi-indices à N composantes.
Donnons une idée de la démonstration.
Alors, dans le cas du produit de convolution
d'une fonction de classe C infini à
support compact par une fonction localement intégrable,
les formules encadrées sont vraies, bien sûr,
et s'obtiennent par dérivation sous le signe somme.
Il faut mettre en place, donc, l'analogue de la notion de
dérivation sous le signe somme, mais dans le cadre des distributions.
Alors voici comment ça fonctionne : je
prends phi, une fonction de classe C infini
à support compact de R, on va faire la démonstration en
dimension un, et je vais poser grand Phi n de x moins
y égale, par définition, à n fois petit phi de x
plus 1 sur n moins y moins phi de x moins y.
Évidemment, lorsque n tend vers plus l'infini, Phi n de x moins
y converge simplement, converge pour tout y, ponctuellement vers Phi
prime de x moins y. Mais en réalité, on a bien plus que cela.
On a le fait que la suite Phi n de
x moins y vue comme fonction de y converge vers petit
phi prime de x moins y vue comme fonction de y
avec une convergence dans C infini à support compact de R.
En effet, le point crucial, c'est que les
supports de toutes ces fonctions, n étant un entier
supérieur ou égal à 1, sont contenues dans le support de la
fonction x moins y vue comme une fonction de y auquel
je rajoute l'intervalle 0, 1 dans lequel varie 1 sur n.
Par conséquent, les supports de toutes ces fonctions sont contenus
dans un compact fixe, et donc on a bien la convergence
dans l'espace des fonctions test de classe C infini à support compact sur R.
Par continuité séquentielle des distributions, T
appliqué à phi n de x moins y vue comme fonction de y,
par définition, par linéarité de T c'est n fois T étoile petit
phi de x plus 1 sur n moins T étoile petit phi de x, donc cette
quantité-là tend bien vers T étoile phi dérivé au point x.
Mais d'autre part, comme Phi n de x moins y vue comme fonction
de y converge dans C infini à support compact de R vers petit
phi prime de x moins y, T appliqué à grand Phi n de
x moins y vue comme fonction de y converge vers T appliqué à petit
phi prime de x moins y vue comme fonction de y.
Et donc par cet argument-là, on a établi que T
étoile phi dérivée est égal à T étoile phi prime.
Alors après, une fois qu'on a cette formule,
la formule qui permet de passer de T étoile
phi prime à T prime étoile phi est
immédiate et elle découle de la définition de dérivée
au sens des distributions.
C'est là l'idée de la démonstration, alors bien sûr,
pour la mettre en oeuvre, il faut quelques détails techniques.
Mais l'idée est celle qui est exposée ici.
Autrement dit, le point essentiel de cette démonstration, c'est
de vérifier que la dérivation par rapport aux paramètres,
ici la dérivation par rapport à la variable x
commute avec le crochet de dualité exactement comme ce
serait le cas avec le théorème de dérivation
sous le signe somme, bien connu en intégration.