Le concept de mondialisation est apparu
dans ce qu’on appelle
les fameuses business managment school,
c’est-à-dire les écoles de gestion, de management
dans les grandes universités nord-américaines,
elle a ensuite été reprise par les consultants,
mais également la presse économique anglo-saxonne
et finalement les hommes politiques
se sont emparés du concept et cela s’est internationalisé.
Mais le phénomène de la mondialisation,
d’après certains auteurs, est beaucoup plus ancien
qu’on ne le croit et remonterait à 5 siècles en arrière.
Ses manifestations sont multiples,
mais provisoirement on peut définir la mondialisation,
à la suite de Anthony Giddens
comme une transformation sociale radicale
de l’espace et du temps,
mais qui implique également
des inégalités et des fragmentations.
Maintenant, en quoi la mondialisation remet en cause
les théories classiques en relations internationales ?
Donc quand nous parlons des théories classiques,
nous faisons référence aux théories réalistes,
aux théories libérales et aux théories marxistes.
La théorie réaliste est la première théorie
en relations internationales,
elle est née d’une discussion, d’un débat,
parce que la discipline évolue par débats,
c’était le premier débat dans la discipline,
entre les réalistes et les idéalistes.
Les idéalistes pensaient qu’on pouvait pacifier
la vie internationale par le droit international,
par les institutions internationales,
et donc par exemple quelqu’un, un idéaliste
comme Wilson misait sur les institutions internationales,
le droit international comme le traité de Versailles,
la Société des nations pour pacifier la vie internationale.
Les réalistes leur disaient,
attention vous êtes naïfs,
vous faites ce qu’on appelle du wishful thinking,
c’est-à-dire prendre ses désirs pour la réalité,
les Etats sont égoïstes,
ils poursuivent une politique de puissance,
raisonnons à partir de ces réalités-là
pour essayer de trouver des solutions.
Mais ils n’avaient pas écouté les réalistes.
Finalement à l’issue de ces débats,
les réalistes ont gagné
parce que les institutions internationales
qui ont été mises en place n’ont pas permis
d’éviter la deuxième guerre mondiale.
Le réalisme repose sur un certain nombre de postulats,
par exemple que l’Etat est l’acteur principal
des relations internationales, il est rationnel.
Ensuite ils disent que l’Etat poursuit une politique de puissance,
c’est-à-dire que l’étude des relations internationales
c’est l’étude des questions de puissance, et donc finalement
l’étude des relations internationales
c’est l’étude des questions de paix et de guerre.
Tout ce qui ne concerne pas les questions
de paix et de guerre ne relève pas
des relations internationales.
Par exemple les questions d’identité
n’intéressent pas les relations internationales
pour les réalistes, les questions de genre
n’intéressent pas les relations internationales,
ou les questions d’économie.
Maintenant, en quoi cette conception réaliste
est remise en cause par la mondialisation ?
La mondialisation a montré
que l’Etat n’est plus l’acteur principal
en tous cas le seul acteur des relations internationales.
Aujourd’hui les grandes décisions ne se prennent plus
dans les enceintes parlementaires, au parlement,
au Palais Bourbon ou au congrès américain,
mais c’est la bourse, c’est le NASDAQ, le CAC40
qui prennent les décisions et les autorités politiques
sont obligées de suivre. Donc à ce niveau,
la mondialisation remet en cause
la centralité de l’Etat comme acteur principal
des relations internationales.
Maintenant pour le deuxième point,
c’est-à-dire l’approche libérale,
comment la mondialisation
remet en cause la théorie libérale
en relations internationales ?
La théorie libérale donc postule que,
même s’ils acceptent avec les réalistes
que les Etats sont en compétition,
ils pensent que cette compétition peut être pacifique
lorsque les Etats sont démocratiques
et sont dans une situation
d’interdépendance économique.
Donc la dimension économique est importante,
la coopération est importante,
les Etats ne sont pas toujours en guerre,
mais ils peuvent toujours aussi coopérer,
et dans le cadre de cette coopération-là
il y a des Etats qui peuvent gagner
et également d’autres qui peuvent perdre.
Un auteur par exemple comme David Mitrany
qui est un fonctionnaliste donc du courant libéral
pense que puisque les affaires hautement politiques
posent problèmes, il faut commencer la coopération
par des domaines à contenus non politiques, qui sont techniques.
Et cela a donné naissance
aux premières organisations internationales.
Les premières organisations internationales
ont été créées sur la base de domaines techniques.
Par exemple, la gestion d’un cours d’eau,
le Rhin par exemple, la Commission européenne
a été construite à partir
de la Communauté économique du charbon et de l’Acier,
donc puisque ce sont des domaines techniques,
les enjeux politiques sont moins forts,
les Etats vont réussir à coopérer.
Et à force qu’ils coopèrent ils vont convaincre
les autres Etats que la coopération peut produire des gains
et les citoyens se rendant compte
de ces services publics internationaux
qui leurs sont utiles vont, de plus en plus
accepter la marche vers cette direction.
Maintenant en quoi la mondialisation
remet en cause la théorie libérale ?
La théorie libérale qui est inspirée
quelque part du libéralisme classique,
pense que donc, avec les progrès,
les échanges et le commerce,
il y aura un enrichissement des nations
et une réduction des inégalités dans le monde.
Mais la mondialisation apporte le contraire,
le monde n’a jamais été aussi riche,
chaque jour il y a plus de 1 500
milliards de dollars américains qui circulent
dans les marchés financiers
mais le monde n’a jamais été aussi pauvre.
D’après la FAO, le Fonds des Nations Unies
pour l’alimentation et l’agriculture, par exemple,
chaque jour il y a plus de 800 millions de personnes
qui souffrent de malnutrition,
alors que l’agriculture mondiale,
au niveau de sa productivité actuelle
peut nourrir le double de l’humanité,
c’est-à-dire plus de 12 milliards d’êtres humains.